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Programme de recherche

Risques tendanciels de long terme

Le rapport sur les limites de la croissance repose sur un modèle emblématique voire unique en son genre, le modèle World3. Le modèle comme les conclusions qui en ont été tirées ont longtemps été très critiquées, notamment par plusieurs courants de pensée économique, mais la situation a changé au tournant des années 2000.

Ci-contre : les projections du scénario standard de World3 comparées à 40 ans de recul historique (Graphique : R. Stevens & P. Servigne)

Pointillés : projections (Meadows, Randers & Meadows, 1972, The Limits to Growth, Universe Books, New York)

Traits gras et bande grisée: données historiques rétrospectives, et comparaison avec les projections du scénario standard (Turner, 2008, Global Environmental Change, 18, 397-411)

Les courbes avant 1973 représentent la calibration du modèle sur l’historique réel

Le débat s’est déplacé de nos jours, et le graphe ci-dessus permet de résumer deux opinions dominantes sur la pertinence du modèle World3 :

Le travail entrepris dans l’équipe STEEP vise à analyser la validité et la robustesse de ce modèle, de façon à objectiver le débat. Ce travail comporte trois volets

  1. Une analyse des choix de paramétrisation fondée d’une part sur une analyse de
    sensibilité nettement plus fine que celles existantes.
  2. Une analyse des choix de modélisation fondée sur une désagrégation sectorielle
    et/ou géographique du modèle, notamment en vue de modifier le système de boucles de rétroactions (celles-ci constituant la part la plus essentielle du modèle).
  3. Des éléments d’analyse épistémologique. Il s’agit notamment de discuter ce que signifie la validation d’un modèle dont une seule instanciation historique pourra avoir lieu (une question similaire se pose dans d’autres domaines scientifiques, par exemple la Cosmologie moderne).

Cette problématique fait l’objet d’un projet de thèse, en cours depuis 2019. Un enjeu potentiel porte sur la possibilité de discerner des risques d’effondrement tendanciels à horizon court terme (pré-2050) ou plus lointains dans le temps (post-2050), les deux cas de figure relevant de stratégies d’atténuation et d’adaptation différentes, qu’il convient d’anticiper correctement.

Risques de contagion systémique de court terme

Dans l’état actuel de la recherche, ces risques restent mal connus. Toutefois, et en laissant de côté les aspects strictement (géo)politiques de la question, ils se prêtent relativement bien à un exercice de modélisation, dont l’objectif premier n’est pas d’obtenir des évaluations quantitatives précises, mais de dessiner une compréhension qualitative et semi-quantitative plus fine des enjeux, les modélisations existantes étant soit trop sectorielles, soit trop génériques. Se limiter aux interconnexions entre énergie, sécurité alimentaire, logistique et finance constitue un objectif ambitieux mais réaliste pour aborder ce genre de problématique.

Plus précisément, le travail envisagé sur ce front porte sur l’élaboration d’un modèle de dynamique des systèmes de ce type de risque systémique. L’objectif est multiple :

  1. Identifier les boucles de rétroaction les plus importantes du système couplé énergie/agro-alimentaire/logistique/finance.
  2. Identifier les maillons les plus fragiles de la chaîne logistique.
  3. Évaluer la vraisemblance de ce type de risque, et, le cas échéant, de définir des stratégies d’atténuation.

Le focus sur les chaînes d’approvisionnement en énergie et matières premières agroalimentaires tient au rôle central (et sous-estimé dans le second cas) qu’elles jouent dans nos sociétés occidentales. Ce travail pourra être réalisé en plusieurs étapes : analyses sectorielles en collaboration avec différents experts, modélisation et tests par blocs sectoriels (par exemple logistique/finance, énergie/finance) avant intégration dans un modèle d’ensemble, calibration (sur données publiques pour ce projet) et étude de scénarios.

Ce travail fait l’objet d’une thèse qui a démarré au sein de l’équipe STEEP en 2019. La première phase a porté sur une réanalyse des problématiques de ressources en hydrocarbures, avec un focus sur les questions de retour énergétique sur investissement (EROI en anglais).