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Stage M2 : Analyse de trajectoire et optimisation des scénarios du modèle dynamique de risques systémiques globaux World3

La question des limites de la croissance de nos sociétés modernes a été soulevée à grande échelle pour la première fois, tant dans le milieu scientifique que dans le grand public, par la publication du « rapport Meadows » (Limits to Growth, Universe Books, 1972), il y a maintenant cinquante ans1. Cette question porte notamment sur l’interconnexion généralisée de tous les pans d’activité humaine, à l’échelle globale. Cette interconnexion s’accélère depuis le tournant des années 1950 et pose des questions de disponibilité des ressources, d’augmentation des pollutions diffuses, et plus généralement de risques systémiques pour les sociétés modernes. Ces questions font l’objet d’une attention croissante dans différentes disciplines, académiques, tant en sciences de l’environnement qu’en sciences humaines et sociales.

Dans ce paysage multidisciplinaire, le modèle World3, sur lequel est basé Limits to Growth, conserve une importance particulière malgré l’émergence de plusieurs autres modèles dynamiques globaux au fil du temps. Cette importance est liée en particulier à l’équilibre qu’il établit entre sophistication et généricité des choix de modélisation. De fait, le regain d’intérêt pour ce modèle s’est d’abord amplifié depuis le tournant des années 2000, notamment suite à une relecture plus objective de son contenu par différents chercheurs de sciences humaines et de sciences dures ; de ce point de vue l’étude de Turner (Global Environmental Change, 2008, 18, 397-411) a marqué un tournant important dans l’évaluation de ce modèle. Par ailleurs, les bouleversements environnementaux, sociaux et politiques que nous vivons actuellement résonnent particulièrement avec les conclusions du modèle, alors que ce dernier, maintenant cinquantenaire, montre une pertinence qui n’a pas failli.

Cependant, les travaux initiaux n’avaient pas pour but de prédire une quelconque trajectoire à long terme, et le but principal de ce modèle explicatif était d’identifier dans quelles directions notre société pouvait évoluer si on la maintenait dans un contexte de croissance forcée, au sein d’un environnement planétaire limité. Cette question a été explorée à travers un certain nombre de scénarios séquentiels, chacun explorant dans quelle mesure la levée des verrous du scénario précédent pouvait donner naissance à une nouvelle dynamique. Dans ce contexte particulier, et alors que nous sommes maintenant presque à mi-chemin de la durée de chaque scénario (courant de 1970 à 2100), il est légitime de se demander quelle trajectoire nous semblons actuellement suivre, afin d’en inférer quelle.s limite.s seront les plus contraignantes dans le futur proche.

Le but de ce stage est de tenter de répondre à cette question. Travaillant à partir des jeux de paramètres définissant les différents scénarios, et en s’intéressant plus spécifiquement à un set de paramètres identifiés comme clés. Il s’agira de mettre en place une méthode permettant de définir le jeu de paramètres optimal, et donc décrivant avec le plus de précision possible la dynamique réellement observée entre 1970 et le présent. Un certain nombre de méthodes d’optimisation combinatoire sont d’ores et déjà envisageables, mais les contraintes propres au problème (difficulté d’accéder à certaines données, incertitudes portant sur d’autres, irrégularités de précision, etc.) pourront certainement guider un choix a priori plus éclairé. Une fois les paramètres ‘optimaux’ (ou en tout cas les plus explicatifs) identifiés, ils pourront être utilisés pour mener une analyse plus poussée de la trajectoire décrite, et tenter de la rapprocher des grandes dynamiques globales actuellement observables.
D’autre part, des méthodes de clustering sur les sorties du modèle pourront également être utilisées pour identifier si des potentiels jeux de paramètres très distincts peuvent résulter à des trajectoires similaires.

1 Depuis sa publication, « The Limits to Growth » a été vendu à près de 30 millions d'exemplaires et traduit en 30 langues.